Les années HIP – Bernard Plossu

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Du 3 octobre 2024 au 9 mars 2025, le Musée Regards de Provence présente l’exposition Les années Hip - Bernard Plossu qui met à l’honneur le début de la riche carrière de Bernard Plossu, figure emblématique de la scène photographique nationale. Tout jeune d’à peine plus de 20 ans, fasciné par la culture hippie, son rêve d’un monde meilleur et sa quête d’une vie davantage en harmonie avec la nature et les éléments, il nous entraine vers la côte ouest des États-Unis et l’Inde qui, un demi-siècle plus tard, continuent d’être irrésistiblement associées à ce mouvement.

Il reste un témoin distant de moments privés et de scènes publiques. Ces presque miniatures en noir et blanc interrogent les codes par leur vision poétique, simple, délicate et intemporelle. Chez lui il ne s’agit ni de reportage, ni de journalisme. L’on y trouve, de manière assez singulière, cette troisième voie où l’image n’est pas un discours sur le monde, mais une question sur le sens que l’on lui donne.

Dès 1966, le voici en Californie pour capter l’atmosphère si particulière qui anime alors ce haut-lieu de la contre-culture : on est un an avant le fameux « Summer of love », qui marquera l’apogée de cette nouvelle expérience sociale. Plossu tourne son objectif vers deux sites en particulier. L’un est en pleine ville, c’est le quartier de Haight-Ashbury à San Francisco, quelques rues à peine bordées de leurs maisons victoriennes typiques qui furent durant quelques années le centre névralgique du mouvement hippie ; l’autre, un peu plus au sud, est un site naturel d’exception, une côte sauvage parfois baignée de soleil et parfois plongée dans le brouillard des jours durant, c’est Big Sur. A en juger par la manière dont il en parle, c’est peu dire que Plossu est resté émerveillé : « c’est le plus beau lieu possible et imaginable, sauvage, brume et paysages à couper le souffle, une sorte d’Ecosse où habitent les gens qui disent non, non à la guerre au Vietnam, non à la société de consommation, les premiers écologistes, en fait ! ». Il fréquente la City Lights Bookstore, mythique librairie adossée à la maison d’édition qui publia les poètes phares de la Beat Generation, croise Allen Ginsberg, Joan Baez et ses sœurs, rencontre Henry Miller et immortalise sans arrière-pensée ses amis artisans, écrivains et artistes.

Quatre ans plus tard, il se rend en Inde – à Ceylan puis à Goa –, souhaitant accomplir ce que tant de hippies considéraient comme un incontournable voyage initiatique, à la découverte d’une forme de sagesse millénaire et d’un rapport différent à la nature et au sacré. Plossu ne fait qu’un avec son sujet : sincèrement hippie, il vit intensément son époque, non sans une certaine naïveté qu’il reconnaît volontiers a posteriori. Indirectement, ses photographies nous racontent sa propre quête d’amour et son aspiration à la paix, puis ses premières désillusions quand il réalise que l’anticonformisme est devenu une mode et que le rêve hippie est en passe d’être recyclé en business lucratif.

Même si Plossu a photographié l’Inde et son retour en Californie avec un grand angle de 24mm en couleur dans les années 70 et 71, il privilégie plutôt une focale de 50mm qui ne déforme ni la réalité, ni la photographie, montée sur un boitier 24×36, créant ainsi une optique non simplement proche de la vision de l’œil humain, mais qui impose une distance minimum d’à peu près deux mètres avec le sujet si on veut le prendre en buste et de quatre mètres pour le saisir en pied.

A l’heure où de nombreux photographes optent volontiers pour la couleur et le grand format, Plossu a fait de longue date le choix exactement inverse, justement comme une volonté de se tenir à distance de toute approche commerciale. L’artiste évite l’envahissement potentiel de l’espace privé par le grand-angle et un dépassement possible de l’intimité du modèle par le téléobjectif.

Si la moisson photographique américaine puis indienne de ses jeunes années n’a pas encore éliminé la couleur, on retrouve ce goût pour les moments de vie sans artifice ni intrusion, alternant les portraits posés et les scènes prises sur le vif, avec cette capacité à capturer l’instant parfait qui caractérise le travail des grands photographes. Cette exposition est le reflet d’une époque qui marqua à jamais Bernard Plossu, et nous rappelle en images que pendant quelques années, les hippies crurent sincèrement qu’un monde meilleur et une vie plus proche de la nature étaient possibles. C’était une génération très pré-écologiste et malgré une apparente naïveté (Peace and Love), le besoin de rendre la vie plus proche de la nature a été pionnier de notre époque actuelle. Infatigable voyageur, lui qui avait arpenté le Mexique dès 1965 parcourra ensuite le Niger, visitera les îles Stromboli et s’établira un temps dans les îles Lipari puis en Andalousie avant de se fixer à la Ciotat, où il réside toujours aujourd’hui.

Paroles de Bernard Plossu
« L’été 1966, un an avant le « summer of love », venant du Mexique, débarquer à Frisco, Carmel, Big Sur, par un hasard extraordinaire, c’était comme changer de peau et de vie : fini les films « qu’il faut avoir vu », les livres intellos qu’on croit devoir lire ! loin des salles de cinéma , voilà les vagues déchainées de l’océan Pacifique, le vent et le brouillard, le souffle de la liberté, les arbres, les aigles, et toute cette génération fascinante pré-écolo qui veut changer de manière de vivre :  les Hippies , suite aux Beatniks qui avaient déjà tout bouleversé de ce qui était prévu …

Des instants de vie photographiés, comme le concert en plein air à Esalen sur la côte de Big Sur, avec les trois sœurs Baez et Allen Ginsberg souriant avec ses petites cymbales, et des milliers de nouveaux bons sauvages aux sourires éclatant de beauté intérieure ; Sheila montant sur son cheval Hoko sans selle pieds nus ; Patty grimpant aux arbres en riant ; Kathy plongeant dans la rivière sauvage de Tasajara ; ou encore Peter jouant de la cornemuse sur une colline… Puis les brumes du Nord, Haight Ashbury à Frisco à ses débuts ! des milliers de jeunes venant de partout pour concerts et bonne herbe…

Mais on est aussi en plein dans la guerre au Vietnam, et les jeunes ne veulent pas aller tuer des gens pour rien dans des pays lointains aux ordres de guerriers pour qui leurs vies ne comptent pas.
PEACE AND LOVE et NON À LA GUERRE.

Le mouvement continuera plusieurs années, et en 70, je rejoins pars en Inde à Goa des amis partis de Californie, à la recherche de sagesse. Certes, il y avait de la naïveté, qui d’ailleurs a été reprochée, mais c’était aussi une lutte pour d’autres valeurs. J’eu la chance, là encore, hasard inouï, de tomber sur la réunion annuelle des SADHUS, ces sages indiens allant de lieu en lieu, qui me laissèrent les photographier. A l’époque, j’avais un grand angle de 24mm, que j’ai abandonné depuis car trop spectaculaire, mais malgré tout, je ne renie pas ces photos qui sont de tels témoignages d’une époque !  Ayant rencontré en 67 la famille des tireurs Fresson, ce sont les tirages vintages de cette époque qui révélés à Marseille pour la première sur les cimaises du Musée Regards de Provence, 57 ans plus tard ! !

Un bon demi-siècle s’est écoulé, mais je reste convaincu que ce qu’a fait ainsi toute une génération, a contribué grandement à un changement radical. Aucun d’entre nous n’aurait même imaginé avoir un jour un téléphone portable ! pour quoi faire ? »

Informations pratiques et Visites du Musée Regards de Provence
Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h
Billet exposition temporaire : Plein Tarif : 8,50€. Tarifs  réduits: 8,00€ – 7,00€ – 6,00 € – 4,50€ – 3,50€.
Visites commentées hors groupe : tarif d’entrée + 7€ /pers. (hors groupe), le mardi et samedi à 15h sur réservation.
Visites commentées pour groupe : tarif d’entrée + 7€ /pers., tous les jours sur réservation.
Visite commentée gratuite hors groupe le premier samedi de chaque mois à 10h30, hors droit d’entrée (plein tarif) sur réservation (6 à 25 personnes).

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